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Le mythe de l’horloge biologique, ou la coercition à la maternité

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Et toi, quand est-ce que tu t’y mets ? Collègue de travail

Vous avez déjà 34 ans, si vous voulez un enfant c’est maintenant. Gynécologue

A ton âge, tu devrais commencer à y penser. Amie d’enfance

L’horloge biologique des femmes n’est pas un mythe. Elle fait réellement tic-tac ! Présente dans l’organisme, elle se régule à partir de l’hypothalamus, une glande du cerveau. Cet élément corporel nous dicte nos actes et nos réactions. Avant 35 ans, vous avez plus de chances de tomber enceinte. Votre corps en a conscience. Site Internet sur la « co-parentalité »

Bon, quand est-ce que vous nous faites un petit ?  Tante relou lors d’un repas de famille

***

Ces petites phrases, toute femme ayant atteint le seuil fatidique des 30 ans les a probablement déjà entendues. Car il n’y a pas – semble-t-il – de norme plus prégnante, plus impérieuse et plus infusée dans le corps social que celle de la maternité.

L’expression « horloge biologique » s’invite souvent à la table des grands débats sur la fertilité des femmes, sans qu’on sache vraiment ce que recouvre cette notion. De quel mécanisme parle-t-on, in fine ? Cette fameuse horloge est-elle un fait scientifique avéré ou bien une invention destinée à faire naître chez les femmes la peur (celle de ne pas réussir à avoir d’enfant) et la culpabilité (celle de n’en avoir pas voulu au moment dit opportun) ?

A première vue, en tout cas, l’horloge biologique ressemble surtout… à la somme des injonctions à la maternité qui pèsent sur les femmes.

Ces injonctions commencent très tôt, de façon diffuse. Les filles sont éduquées à prendre soin des autres, dressées à s’intéresser très tôt au monde de la petite enfance. On leur offre des poupons à Noël, on leur confie le soin de s’occuper de leurs frères et sœurs, puis, plus tard, on leur permet de s’aventurer hors de la sphère familiale pour faire leurs premières heures de baby-sitting – petit boulot féminin par excellence. Ce chemin parfaitement jalonné doit leur permettre de faire progressivement l’apprentissage de la maternité, en prévision de leur futur rôle social.

Les femmes qui ne veulent pas d’enfants enfreignent donc les lois qui préexistent à leur destin. Leur refus est vécu comme une insurrection, comme la transgression d’une puissante loi tacite.

Non seulement le désintérêt pour la maternité (ou le regret de s’y être aventurée) demeure une terra incognita dans l’histoire de la pensée, mais le désir d’enfant est aussi le seul dans notre société à n’être jamais remis en cause, comme si celui-ci devait prévaloir sur toute considération logique. Pourtant, les maltraitances et violences sur enfants, et a fortiori les infanticides (qu’aucun outil statistique ne permet malheureusement de tracer en France) font état d’une réalité poisseuse : celle de parents qui n’auraient jamais dû le devenir.

Peut-être faudrait-il s’interroger, dans un premier temps, sur le caractère délétère que revêt la pression de la maternité sur les femmes, qui leur fait croire qu’il s’agit de la seule finalité possible de leur existence. Et les condamne à endosser une fonction qu’elles ne désirent pas toujours, mais dont la puissance mythologique continue d’exercer sa tyrannie.

Peut-être faudrait-il ensuite s’interroger sur le caractère éminemment social du désir d’enfant, lequel est précédé d’un tel conditionnement qu’il ne laisse guère la place à la volonté et à la réflexion individuelles.

Hélas, ce sujet éminemment tabou reste le grand impensé de nos sociétés contemporaines. Proposons donc ici une ébauche de réflexion sur l’injonction sociétale à la maternité et les conséquences délétères du mythe de l’horloge biologique.

Tu l’as vue, ma grosse natalité ?

Depuis des années, les Etats se battent à coups d’indicateurs de fécondité et de taux de natalité, dans une pantomime qui n’est pas sans rappeler les classiques concours de pénis. Dans cette course effrénée, c’est en effet à celui qui aura la plus grosse (natalité). Pourtant, alors que la planète semble sur le point d’imploser – et que les prévisions de l’ONU font état d’une population mondiale de 11,2 milliards habitant.e.s en 2100, les préoccupations natalistes, qui étaient certes légitimes après-guerre, semblent aujourd’hui ridiculement archaïques.

Considéré comme un indicateur de puissance (donc de virilité ?) étatique, le taux de natalité est devenu au fil du temps un enjeu géopolitique. Pourtant, n’est-il pas quelque peu dérangeant, d’un point de vue éthique, de faire du taux de natalité et de fécondité un indicateur que l’on soupèse, commente, analyse, compare et soumet à des objectifs chiffrés ? Les femmes – et les hommes – ne se reproduisent pas, a priori, pour des raisons politiques, ni pour aider leur pays à atteindre un quelconque objectif démographique…

Lorsque paraît un énième article catastrophiste sur la chute de la natalité dans les pays européens, que doit-on en conclure ? Est-on censée (j’accorde volontairement au féminin) se sentir responsable ? La maternité est-elle un devoir citoyen ou un droit personnel ? Le corps des femmes doit-il être utilisé à des fins politiques ? Peut-on décemment mesurer et commenter la fécondité des femmes, comme si celle-ci était au service de l’Etat ? Enfin : peut-on vraiment gérer la natalité d’un pays comme on gère une entreprise, avec toutes les potentielles dérives éthiques que cela comporte ?

C’est que le contrôle du corps des femmes, vieille tradition commune à presque toutes les nations, trouve dans la mesure de la natalité un lieu idéal pour se déployer et exercer sa mainmise. Le ventre des femmes est ainsi envisagé comme une propriété collective, un monopole public. Par ailleurs, la coercition à la maternité, qui s’exerce aussi bien par le corps social, médical et politique que par l’entourage proche est un moyen (pas nécessairement conscientisé) de maintenir les femmes dans une position subalterne. En effet, pendant que les femmes font des enfants, elles ont moins de temps pour pénétrer les sphères politiques, économiques et culturelles, construire leur carrière et prendre le pouvoir. Bien entendu, fonder une famille ne condamne pas à une vie domestique hermétique à tout élément extérieur. Mais dans une société aussi peu flexible que la nôtre, la maternité agit vite comme un rempart entre la sphère privée et le monde extérieur, entre l’intimité et les ambitions professionnelles. Et sans un conjoint qui prend sa part, l’exercice se complique d’autant plus. Or, en France, plus d’une mère sur deux d’enfants de moins de huit ans s’est arrêtée de travailler après la naissance de ses enfants ou a réduit temporairement son temps de travail.

Elle est aussi un moyen très efficace de maintenir les femmes et les hommes dans leurs rôles de genre traditionnels. Et, ainsi, d’empêcher tout bouleversement sociétal dans lequel les femmes prendraient (enfin) la part de pouvoir qui leur revient.

Les préoccupations natalistes permettent en tout cas de mettre en lumière une volonté d’appropriation collective du corps des femmes, qui se traduit – entre autres – par le contrôle de leur fécondité. Et l’incitation à procréer à tout prix, particulièrement lorsqu’elles correspondent au modèle-type de la bonne reproductrice : blanche, jeune, hétérosexuelle et relativement éduquée. (1)

La peur comme vecteur de coercition

Depuis quelques temps, les études et articles catastrophistes se multiplient : effondrement de la natalité, terribles difficultés à concevoir après 35 ans, ne pas s’y mettre trop tôt mais surtout pas trop tard non plus, l’âge du premier enfant recule, les femmes préfèrent se consacrer à leur carrière (n’importe quoi !) ou même à leurs loisirs (encore pire !), important de ne pas attendre trop longtemps, fenêtre de fertilité, date de péremption, horloge biologique, tic-tac tic-tac, pensez-y entre la liste de courses, le dossier à rendre et le dîner à préparer. Et voici une pression de plus à mettre sur le dos des femmes, comme si la liste n’était pas déjà assez longue.

Une de mes connaissances ayant à peine dépassé le stade des 25 ans a fait les frais de cette « coercition » à la grossesse. Son gynécologue ayant décelé chez elle une anomalie au niveau des ovaires, il lui a presque intimé l’ordre de procréer dans les deux années à venir. « Déjà aujourd’hui, ça risque d’être difficile. Si vous attendez, vous risquez de ne jamais avoir d’enfant ». La peur au ventre, et bien que n’ayant pas le projet d’enfanter dans les années à venir, elle a alors arrêté la pilule. Elle est tombée enceinte presque instantanément.

« Aujourd’hui, on décide de faire des enfants de plus en plus tard. Attention, la fertilité des femmes commence à ralentir dès 30 ans. » (Doctissimo)
« Les probabilités de concevoir un bébé chutent significativement entre le début de la trentaine et l’approche de la quarantaine. Au fil des années, la fertilité d’une femme baisse énormément. C’est pourquoi les experts en fertilité conseillent aux femmes entre 30 et 39 ans de ne pas trop attendre […] » (Babycenter.fr)

C’est bien la peur qu’on nous accroche au ventre, à cet endroit même où la société étend son territoire et ensevelit ses racines. Et qu’on ne s’y trompe pas, ces perpétuelles incitations à la grossesse ne viennent pas d’une volonté d’œuvrer pour la santé publique en faisant de la prévention sur les problèmes de fertilité : même sans être forcément conscientisées, elles tirent bien leur source d’une volonté séculaire de contrôler le corps des femmes.

La maternité – qu’on a peint comme une suite de délices ininterrompus – est en réalité une parfaite excuse pour maintenir les femmes sous le joug de la société. En remplaçant le désir individuel par un désir social, construit et affiné avec les années, on s’assure d’une soumission consentie des femmes à leur destin procréateur, et donc à leur confinement dans la sphère privée.

À l’origine, l’horloge biologique, ou horloge interne, désigne l’ensemble des mécanismes qui génèrent chez l’être humain un certain nombre de réactions biologiques régulées par cycles (comme le sommeil). On parle aussi d’horloge circadienne, ou de cycles circadiens. Elle existe donc bel et bienmais elle n’est pas celle qu’on croit !

L’expression que nous employons pour parler de la fertilité féminine est récente : elle est apparue pour la première fois en 1978 dans un article intitulé « The Clock Is Ticking for the Career Woman » (« l’horloge tourne pour la femme qui fait carrière ») paru dans le Washington Post. Cet article – écrit par… un homme – avait pour but de dépeindre les difficultés rencontrées par les femmes à faire coïncider l’avancement de leur carrière avec leur volonté d’avoir une vie de famille. Elle a ensuite été reprise, jusqu’à devenir ce mythe populaire à mi-chemin entre la métaphore et le phénomène scientifique que nous connaissons aujourd’hui.

L’horloge biologique féminine, que l’on a fait passer au fil des années pour un phénomène scientifique avéré, n’est donc initialement qu’une figure de style destinée à évoquer la difficile conciliation entre vie professionnelle et vie privée.

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Désir d’enfant, entre nature et culture

Les soubresauts de « l’horloge biologique », que l’on dépeint souvent comme une bombe à retardement nichée dans le corps des femmes (mais où exactement ?), font donc partie des mythes populaires de notre culture. Il est temps désormais de mettre au jour son caractère fallacieux.

En effet, aucune étude scientifique n’a jamais pu confirmer l’existence d’un phénomène biologique/hormonal qui conduirait les femmes à désirer un enfant de manière irrationnelle à partir d’un certain âge. Ce désir que l’on présente comme viscéral, insondable et ancré dans la chair serait en réalité… une pure construction sociale.

Une étude conduite sur une décennie et publiée en 2011 dans la revue académique Emotion a permis de montrer que le désir d’enfant se réveille souvent de manière abrupte et imprévisible, chez les femmes comme chez les hommes. Sauf que « les hormones » ou « l’inné » n’ont rien à voir là-dedans : c’est avant tout l’exposition aux enfants ainsi que le désir d’expérimenter la parentalité, en tant qu’étape fondatrice de la vie d’adulte, qui entraînent chez les individus le désir d’avoir des enfants. En résumé, plus les individus ont l’occasion d’interagir avec des enfants et/ou d’observer les personnes de leur entourage devenir parents, plus leur désir d’enfant s’accroît. Une étude suédoise réalisée en 2010 a d’ailleurs révélé que les femmes étaient plus susceptibles de tomber enceintes au moment où leurs collègues de travail commençaient à avoir des enfants. Mimétisme social ou véritable envie suscitée par l’observation de ses pairs ?

La question reste ouverte. Quoi qu’il en soit, il semble bien que ce n’est pas la « nature » qui est le facteur prédéterminant dans notre désir d’avoir des enfants, mais bien la culture.

Le psychologue américain Frederick Wyatt (1911-1993), dont les travaux portaient notamment sur la maternité, écrivait à ce sujet : « Quand une femme dit qu’elle ressent l’envie viscérale d’avoir un enfant, elle recourt au langage de la biologie pour mettre en mots ce qui relève de la psychologie ».

Le sociologue et ex-président de l’Association américaine de sociologie William Goode (1917-2003), lui, tenait ces propos : « Il existe chez l’être humain des réflexes, comme le clignement des yeux, ou des besoins, comme le sexe. Mais il n’y a pas de besoin viscéral d’enfanter. Autrement, la pression sociale à se reproduire n’existerait pas. »

Forger la peur : des études biaisées

Si l’injonction sociale à procréer vise avant tout les femmes, c’est pour mieux les remettre à leur « place ». Et cette injonction va de pair avec la terreur distillée par les médias quant au déclin rapide de la fertilité féminine. Pourtant, les informations anxiogènes dont ils se font l’écho s’avèrent souvent inexactes, voire réarrangées. 

Loin du catastrophisme ambiant, les chiffres font en effet état d’une réalité nettement plus positive.

La psychologue américaine Jean Twenge raconte dans cet article la stupeur qu’elle a ressentie en analysant un certain nombre d’études scientifiques portant sur le déclin de la fertilité féminine. Au fil de ses recherches, elle s’est rendu compte que ces études étaient la plupart du temps biaisées, basées sur des sources lacunaires et/ou interprétées de manière incorrecte. Prenons par exemple cette étude parue en 2004 dans la revue Human Reproduction, qui conclut qu’une femme sur trois ayant entre 35 et 39 ans échouera à tomber enceinte au bout d’un an. Celle-ci a été reprise partout, contribuant à alimenter la paranoïa sur les (prétendues) difficultés à concevoir après 35 ans. Ce que cette étude ne précise pas, c’est que pour aboutir à un tel résultat, elle se base sur des calculs réalisés à partir d’actes de naissance français datant de 1670 à 1830. Des sources bancales et vieilles de 300 ans ? Pour la rigueur scientifique, on repassera !

Jean Twenge a également découvert que les études faisant état de résultats « optimistes » sur la fertilité des femmes étaient étonnamment peu citées dans les médias, ou bien tout simplement réarrangées par les journalistes. Elle s’étonne ainsi que l’étude du statisticien David Dunson, conduite dans les années 2000 sur 780 femmes venant de sept pays européens différents, soit si peu citée dans les médias. Car les résultats de celle-ci sont bien plus rassurants : 82% des femmes âgées de 35 à 39 ans tomberaient enceintes naturellement en l’espace d’un an, contre 86% pour les femmes de la tranche d’âge 27-34 ans. La différence entre les deux groupes d’âge (4%) est minime, ce qui contredit l’idée reçue selon laquelle il serait particulièrement difficile de concevoir après 35 ans.

D’autres études récentes semblent corroborer ces résultats. Celle-ci, menée au Danemark sur 3000 participantes, rapporte ainsi que 72% des femmes de 35 à 40 ans tomberaient enceintes naturellement dans les douze mois (78% pour celles qui avaient pris soin de synchroniser leurs rapports sexuels sur leur période d’ovulation).

Dans son article, Jean Twenge raconte avoir eu 3 enfants, tous nés après ses 35 ans. Malgré ses craintes, nourries par ses lectures et par le pessimisme de son entourage, ils furent conçus de manière naturelle et sans difficultés particulières.

Il faut donc retenir de tout cela que la plupart des femmes ayant entre 35 et 40 ans (voire plus) peuvent tomber enceintes naturellement, sans rencontrer de difficultés spécifiques.

Car il semblerait en réalité que l’âge ne soit pas en cause chez la grande majorité des femmes qui peinent à tomber enceintes. Les coupables peuvent être une perturbation hormonale non liée à l’âge, une endométriose (souvent non diagnostiquée), une mauvaise hygiène de vie (tabac, alcool…) ou bien des lésions utérines causées entre autres par d’anciennes infections sexuellement transmissibles non traitées. Sans oublier les facteurs externes, dont l’influence croissante n’est pas à négliger : pollution, pesticides, perturbateurs endocriniens, etc. En somme, une femme de 38 ans qui éprouve des difficultés à tomber enceinte aurait probablement eu les mêmes… à 28 ans.

Enfin, la moitié des problèmes de fertilité viendraient des hommes (c’est fou comme on a tendance à oublier que les femmes ne font pas des bébés toutes seules !). Si l’âge n’est pas le seul déterminant (d’autres facteurs comme la consommation de tabac et/ou d’alcool, l’hygiène de vie, le poids et les maladies génétiques sont à prendre en compte), il n’en reste pas moins que la qualité du sperme décline avec les années. Comme le souligne l’article Stérilité, fertilité : la part des hommes« pour l’homme, la fertilité est maximum à 30-34 ans (indice à 100), puis elle diminue lentement. À 55-59 ans, l’homme a une fertilité deux fois plus faible (indice à 47) que celle observée à 30-34 ans. La fertilité des couples diminue donc avec l’âge de l’homme, même si cette diminution est moins importante et plus tardive que celle observée avec l’âge de la femme ». 

Étrange que l’on n’exhorte pas autant les hommes à faire des enfants « jeunes », au moment où la qualité de leur sperme est à son apogée !

Ceci étant posé, il reste que la fertilité féminine n’est évidemment pas la même à 40 ans qu’à 25. Et qu’elle est, nous le savons, limitée dans le temps. C’est une injustice biologique contre laquelle il est vain de se battre. Lorsque nous voyons des stars pouponner à 50 ans bien tassés, nous devons avoir conscience qu’il y a une entourloupe quelque part ! Par ailleurs, le risque de fausse couche et d’anomalies chromosomiques augmente avec l’âge (de la femme… et de l’homme). Est-ce pour autant qu’il faut absolument « se dépêcher » et planifier toute son existence autour de potentiels enfants à venir, quitte à passer à côté de certaines opportunités ? Est-ce pour autant qu’à partir de 35 ans, les dés sont jetés, et avec eux tout espoir de devenir mère un jour ? De nombreuses études scientifiques, certes peu relayées pour des motifs que l’on devine politiques, nous ont déjà fourni la réponse, et elle tient en trois lettres : non.

Trop tard !

L’exaltation de la maternité et son corollaire, l’injonction à procréer « rapidement » ou du moins dans le temps imparti, tirent leurs racines d’une vision sexiste des femmes comme simples incubateurs. Le corps social ne voit d’elles que leur utérus et leur capacité à procréer. C’est pourquoi il exige leur soumission au cadre temporel dans lequel la maternité doit s’exercer – grosso modo, entre 25 et 33 ans.

Les femmes qui font des enfants « tard » par rapport à la norme établie sont donc sermonnées, punies par les corps médical et social pour leur négligence. « Faire un enfant à 40 ans, c’est irresponsable », « il fallait y penser plus tôt », « elle sera une vieille mère », chuchote-t-on avec désapprobation. Et c’est là qu’apparaît la réalité crue : la pression de l’horloge biologique est avant tout une pression sociale, utilisée contre les femmes pour les infantiliser et blâmer les choix qu’elles font en toute autonomie. La règle est valable dans tous les domaines : lorsqu’une femme dévie de la norme et tente d’échapper au contrôle social en traçant son propre chemin, elle est ostracisée.

Mais les femmes ne sont pas stupides. Celles qui font des enfants « sur le tard » le font généralement en toute connaissance de cause, soit parce qu’elles n’en avaient pas envie avant (et c’est une raison suffisante), soit parce qu’elles ont mis du temps avant de rencontrer le bon partenaire. L’injonction à la maternité – pas trop tôt, mais surtout pas trop tard – pose une question intéressante : est-ce qu’avoir « le bon âge » ou « la bonne situation » est une raison suffisante pour faire des enfants ? Plus généralement, doit-on faire passer la norme sociale avant ses propres désirs – si seulement nous sommes encore capables de les distinguer ?

Une des « excuses » les plus communément avancées pour justifier la tendance des maternités tardives est celle de la carrière. « Avec l’allongement des études, les femmes commencent leur carrière plus tard et repoussent donc en conséquence la maternité », peut-on lire dans les articles consacrés à ce sujet. Jamais, cependant, n’aborde-t-on le sujet autrement : envie de profiter de sa jeunesse, de voyager, non-désir d’enfant qui a perduré jusque tard, désintérêt pour la maternité, envie de se consacrer avant tout à soi-même ou à son couple. Non pas que les femmes qui ne veulent pas d’enfants aient à se justifier de quoi que ce soit : simplement, il est curieux d’opposer sans cesse la maternité à la carrière, comme si ces deux notions étaient indissociables. Vous n’êtes pas particulièrement ambitieuse et/ou vous n’avez pas de travail ? Faites un pas en avant et placez-vous sur la case « mère » : le champ est libre, il est temps de mettre votre utérus à profit ! A contrario, vous avez la ferme intention de vous consacrer à votre carrière ? Vous voilà placée d’office dans l’autre camp, celui des Wonder Women montées sur stilettos, obsédées par la réussite, prêtes à prendre le premier avion pour aller faire congeler leurs ovocytes à l’étranger et renvoyer toute idée de grossesse aux calendes grecques.

Mais les choses sont évidemment bien plus complexes que cela. On peut n’avoir pas spécialement envie de se consacrer à sa carrière (ou préférer se consacrer à ses loisirs et ses voyages), sans désirer non plus avoir un enfant. À l’inverse, de fortes ambitions professionnelles ne sont pas incompatibles avec le fait de fonder une famille. Les intérêts des femmes ne sont pas réductibles à ce binarisme absurde qui oppose les langes à l’attaché-case, comme s’il n’y avait que deux voies possibles dans ce monde aux opportunités multiples.

Dans une société patriarcale qui voit avant tout dans les femmes des mères et des épouses, cette conception des choses est pourtant peu intelligible. Le désintérêt (ou, a minima, l’intérêt tardif) de certaines femmes pour la maternité doit nécessairement s’expliquer par des raisons concrètes, rationnelles et pragmatiques. Le fait que certaines femmes n’aient tout simplement pas envie d’avoir des enfants semble encore relever de la science-fiction. Notre cerveau collectif est resté bloqué au seuil du XXIe siècle, à une époque où les rôles de genre étaient strictement définis par la société… et où le bonheur et l’épanouissement individuel s’en trouvaient aussi, souvent, compromis.

Dans le champ de l’intime

S’il y a bien un champ dans lequel les influences extérieures ne devraient pas avoir de prise, c’est bien celui de l’intime. Le désir ou non-désir d’enfant (l’INED évalue à 5% de la population la proportion de femmes et d’hommes qui ne veulent pas devenir parents) ne devrait en aucun cas être contrôlé, observé, analysé, soupesé par des parties extérieures. Il n’y a pas d’ingérence qui soit acceptable en matière d’aspirations intimes. Et quoi de plus intime que le désir (ou non-désir) de devenir parent ?

Il m’a toujours semblé étrange, puis révoltant que la société s’immisce avec une telle impudence dans la vie privée des individus. Mais si le désir d’enfant existe par défaut chez les femmes, s’il est réellement constitutif de leur identité, pourquoi ce besoin de les rappeler sans cesse à l’ordre ?

Instinct maternel, horloge biologique… tous les mythes sont bons, en réalité, pour renforcer l’idée naturaliste de la maternité comme destin irrévocable. Si une femme exprime son indifférence ou pire, son hostilité à l’égard de la maternité, on cherchera à la psychanalyser pour mieux comprendre d’où vient cette terrible faille. On s’évertuera ensuite à poser un diagnostic permettant de justifier sa réticence (enfance dysfonctionnelle, traumatisme ancien, relations familiales douloureuses, peurs inconscientes…) puis, dans une ultime tentative pour la sauver, à lui trouver des substituts à la maternité (création artistique, écriture, travail avec des enfants, etc). C’est bien simple : l’inconscient collectif réfute l’idée qu’une femme puisse ne pas être mère, ne serait-ce que symboliquement.

Pourtant, il n’y a pas plus de raison(s) au désir d’enfant qu’au non-désir d’enfant. Il est ou il n’est pas : c’est tout. Et que de vies gâchées auraient pu être évitées sans les crochets empoisonnés de la pression sociale !

Doit-on accepter que les femmes continuent à être infantilisées par les discours alarmistes des « experts » en fertilité (presque tous des hommes, bizarrement), par les remontrances agacées du corps médical qui les presse de procréer dans les limites d’une fenêtre temporelle convenable, par les études anxiogènes sur la baisse de la natalité ? La société a-t-elle seulement une part à prendre dans l’intimité du corps des femmes ? Et si oui, dans quel but exactement ?

Mais dans ce débat, d’autres questions se posent aussi. Et celle-ci est éminemment politique : la société doit-elle se porter garante du désir d’enfant des individus ? Doit-elle être responsable de la capacité (ou incapacité) de chacun.e à procréer ?

Conclusion

L’horloge biologique féminine est bien un mythe, en ce qu’elle relève d’une construction imaginaire. En 40 ans d’existence, elle a su s’imposer comme un puissant vecteur de contrôle et de domination du corps féminin. A tel point que les femmes elles-mêmes ont fini par l’intérioriser, persuadées après de longues campagnes de terreur que leurs organes reproducteurs commencent à se nécroser dès l’âge de 30 ans.

Mais ce mythe les dessert à plusieurs niveaux. Premièrement, il contribue à renforcer cette conception – sexiste – d’une femme irrationnelle, gouvernée par ses hormones, qui ne pense qu’à partir à la chasse au géniteur les babines retroussées. Deuxièmement, il abîme les relations entre les femmes et les hommes, qui à partir d’un certain âge se retrouvent entachées de cette ombre inconfortable. Qui n’a jamais entendu cette phrase cruelle : « moi, je ne sors pas avec des femmes de plus de 30 ans, elles ne pensent qu’à faire des gosses » ? De l’autre côté du spectre, qui n’a jamais vu de femme se ronger les sangs à propos de la date de péremption apposée sur sa fertilité, encouragée dans ses tourments par sa famille, ses ami.e.s, son gynécologue ? Enfin, il pose sur les femmes une intolérable pression, tout en les reléguant à leur seul rôle de mère potentielle.

En effet, l’injonction à procréer rapidement sous-entend que les femmes ne peuvent être « conformes » et « honorables » qu’en devenant mères. Tout refus de remplir ce rôle, mais aussi tout retard dans l’accomplissement de cette mission les condamnera alors à un ostracisme social certain. C’est un constat désespérant qu’il nous est donné de faire là : plus d’un demi-siècle après les premières révolutions féministes, la place des femmes demeure circonscrite à un minuscule pré carré.

Et si nous donnions un (gros) coup de balai dans nos représentations mentales ? Si nous cessions de réduire l’identité féminine à la seule maternité ? Si nous cessions, ensuite, d’instrumentaliser cette maternité à des fins politiques, et d’infantiliser les femmes en les pressant de ressentir des désirs qui appartiennent avant tout à la société ?

Si les femmes ne seront pas fécondes toute leur vie – et, à moins d’avoir grandi dans une grotte six pieds sous terre, elles sont au courant, il est injuste et inutile de faire peser sur elles seules le fardeau de la fertilité. Leur corps a beau fonctionner différemment, les hommes ont une responsabilité égale à endosser. 

Comme les femmes célibataires prises dans l’étau de la pression sociale, les femmes nullipares (qu’elles aient l’intention de le rester ou non) souffrent souvent plus du reflet que la société leur renvoie que de la réalité de leur situation. Et si nous les laissions déterminer leur trajectoire, en fonction de leurs projets, de leurs désirs et surtout du moment présent ? 

 

(1) Ce pan de l’histoire française est peu connu, mais des milliers d’avortements et de stérilisations non consenties ont été pratiquées dans les années 60-70 sur des femmes noires et pauvres de la Réunion. Ces procédures médicales étaient soutenues par les pouvoirs publics, qui poursuivaient dans les colonies françaises un objectif de décroissance démographique. Pendant ce temps-là, en France métropolitaine, l’avortement et la contraception étaient criminalisés. Deux poids, deux mesures…

33 réflexions sur “Le mythe de l’horloge biologique, ou la coercition à la maternité

  1. Toujours aussi passionnant ! Cet article est très intéressant d’autant plus que je m’intéresse beaucoup à la maternité qui est un sujet qui me passionne depuis longtemps. Je suis justement en train de lire Le ventre des femmes de Françoise Vergès qui traite de ce scandale à la Réunion. On comprend vraiment à quel point les questions natalistes sont d’une hypocrisie crasse. Merci pour ton article qui explique des choses dont on entend peu parler et remet les dites choses à leur juste place ! Ça fait du bien et ça m’aide également à mieux comprendre et cerner mes propres désirs. Continue ce que tu fait !

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    1. Oh merci beaucoup ! Moi aussi, le sujet de la maternité me passionne d’un point de vue sociologique. Il est au croisement de tellement de thématiques. C’est « drôle » que tu sois en train de lire ce livre justement, j’en ai entendu parler pendant mes recherches pour cet article et il a l’air très intéressant. N’hésite pas à me faire un retour à la fin de ta lecture, si tu en as envie !

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  2. Ah oui, ces politiques natalistes si profondément ancrés dans nos têtes… Je me souviens encore d’un cours d’histoire-géo au collège (!!) où la prof nous avait exhorter à faire des gosses pour « sauver » la France. Déjà à l’époque je me disais « WTF ?! »

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  3. Je suis moi-même passée par la case « à 30 ans tu atteins ta date de péremption pour faire des enfants ». Ce n’est que tout récemment que j’ai commencé à me questionner. Ton article est riche et intéressant, tu m’as apporté de nouveaux éléments pour remettre « l’horloge biologique » en question ! Merci 🙂

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  4. Toutes mes félicitations et mes encouragements pour votre blog. Je viens de tomber sur un de vos articles dans un fil d’actualité FB et ça m’a permis de vous découvrir. Vous résumez très bien et de façon logique des ressentis que je ne pense pas être la seule à avoir, sans forcément mettre des mots dessus. Cela a son utilité quand on se retrouve comme deux ronds de flanc devant un gros c… misogyne qui tente de nous faire taire à coup d’arguments cent fois rabâchés.

    J’en profite aussi pour faire un (long) aparté qui résonne avec cet article sur l’injonction à la maternité. En fait je viens tout juste de voir le 1er épisode de « On va s’aimer un peu, beaucoup… » qui passe en ce moment sur F2. Le tout 1er épisode et que vois-je ? l’héroïne à laquelle la spectatrice est censée s’identifier (je pense qu’il y a plus de femmes que d’hommes qui regardent cette série) est FORCEMENT en couple et maman de deux enfants, et crac ! en plein milieu d’épisode, elle fait un test de grossesse qui s’avère positif. Bon d’accord on la voit hésitante et il est possible que la série renouvelle le genre en montrant, POUR UNE FOIS, une femme qui décide que non, ce n’est pas le moment. On verra bien ce que les épisodes suivants nous réservent. Il n’empêche que chaque fois que je me lance dans une nouvelle série avec des héroïnes féminines, je ne peux empêcher ce petit réflexe de déception qui gâche mon plaisir, dès que je découvre qu’elles sont déjà encombrées d’un marmot, ou qu’elles s’aperçoivent après une nuit d’amour qu’elles sont sur le point de l’être (et après moult hésitations, décident de le garder, et… tadaam! C’est un beau petit garçon ! – bah oui, fabriquer des petites filles n’est sans doute pas assez viril pour le héros, et indigne d’une vraie héroïne selon les codes du patriarcat). J’ai beau faire des efforts, je n’arrive pas à m’identifier à ces personnages, tout ce qui a trait à la maternité m’ennuie profondément et je me contrefiche des problèmes familiaux des héroïnes.. Même ce qui est censé être un plaisir comme une série moderne véhicule une grosse part de pression et je revis à chaque fois ce moment de déception, à la fin c’est agaçant.

    (Et je parle même pas de la mère et la fille en train de partager une salade dans une discussion au bureau entre « femmes modernes à super godasses de marque commençant par S et finissant par O ». Non mais franchement, pas le coup de la salade, quoi !)

    En tout cas ce genre d’articles est salutaire pour que les femmes se sentent encouragées à dire haut et fort ce qu’elles pensent. Maintenant que j’ai découvert votre blog, je le suivrai avec intérêt !

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    1. Merci pour votre commentaire !
      Vous avez tout à fait raison de pointer le fait que les représentations culturelles des femmes sont uniformes : elles sont mères, épouses, et rarement plus. Leur vie est centrée autour de leur famille, leurs enfants. Et dès qu’il y a une grossesse dans une série ou un film, elle est quasiment toujours dépeinte comme une super nouvelle, une fois passé le proverbial moment de doute qui dure 30 secondes. La question de l’hésitation, de la colère, du non-désir, du refus, et a fortiori de l’IVG n’est quasiment jamais abordée, alors même que cela concerne des milliers de femmes… Et que cela fait partie de la vie !

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  5. Merci pour cet article. Il y a un point que vous n’abordez pas et qui est cruel c’est que cette pression sur les femmes est souvent faite par d’autres femmes.
    Moi j’ai quarante ans passé, je n’ai pas d’enfants et je n’en veux pas. C’est mon choix et j’ai la chance de le partager avec mon mari.
    Dans ma trentaine et même un peu avant, surtout après m’être mariée, la pression pour avoir un enfant était omniprésente. Mon environnement professionnelle était presqu’ exclusivement féminin. J’ai eu droit à tout notamment à la célèbre phrase : « tu verras ça viendra un jour » en désignant l’envie d’avoir un enfant. En fait aucune des femmes de mon entourage ne comprenaient que je n’avais pas envie. Par la suite, en changeant de job, j’ai fait beaucoup d’entretien d’embauche. Et bien, la question de la maternité revenait tout le temps lorsque j’avais une femme en face de moi. Elles ont pratiquement toutes osé me demander : « pourquoi vous n’avez pas d’enfant ? ». Un jour j’ai répondu : « c’est la Nature qui décide ». La personne s’est sentie très mal à l’aise. Je trouvais cette question hors de propos et puis quelle violence surtout si je désirais ardemment un enfant et que je n’y arrivais pas !
    J’ai aussi eu droit au nouveau né qui arrive autour duquel toutes les femmes présentes s’agglutinent… sauf moi. Et là je vais tout de même voir et l’on me dit : »ça ne te donne pas envie ? ». Moi, direct : « Non ». Tout le monde s’est retourné totalement estomaqué. J’ai adoré ce moment, je l’avoue.
    J’ai aussi eu plusieurs de mes collègues me disant qu’elles auraient aimé avoir eu le courage de ne pas faire d’enfants. Pourtant ce choix elles l’ont toujours eu…
    J’ai aussi eu ce témoignage : « tu sais même quand tu as un enfant on continue à te faire chier en te demandant : et le deuxième c’est pour quand ? ».
    Les femmes ont totalement intégré cette notion d’enfanter que beaucoup ne comprennent pas que certaines voient les choses différemment. Sans doute y a-t-il une part de ce que je qualifierai maladroitement de jalousie.
    C’est une manière de réduire le rôle de la femme dans la société humaine. Pourtant ce rôle d’enfanter est le plus grand pouvoir qui existe et c’est sans doute cela qui fait peur aux hommes. Récemment j’ai lu un livre dans lequel l’auteur rappelle ceci : « chez les mammifères, on peut plutôt se passer des mâles, tandis que les femelles sont un facteur limitant pour la survie et le succès de l’espèce, chaque femelle est précieuse ». Je crois que tout est dit 🙂
    Je m’excuse d’avoir été très longue mais le sujet me tient tellement à coeur que je pourrai écrire un livre.

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    1. Je suis contente que vous pointiez cela. J’ai remarqué aussi que les femmes étaient très « efficaces » pour relayer les normes patriarcales, particulièrement en ce qui concerne la maternité. C’est une forme de conditionnement qui est très très fort, et si on ne réfléchit pas à ces sujets, on n’a presque aucune chance d’en sortir ni de voir à quel point réduire les femmes à un rôle de mère est nocif pour l’égalité des sexes.
      Et peut-être qu’il y a aussi, comme vous le soulignez, une forme de jalousie envers celles qui ont réussi à se défaire des normes sociales…

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      1. En plus je trouve cela très difficile de répondre face à une femme. Je me dis : mais elle doit ressentir les mêmes choses que moi, non ? Et bien non ! Totalement endoctrinée. Du coup trouver des arguments devient très difficile.
        J’avoue être souvent en colère quand une femme n’arrive pas à comprendre mon point de vue « féminin » et qui est souvent plus véhémente qu’un homme. Je déteste quand les femmes disent : « tu vas voir la grossesse, c’est génial » ou encore « quand t useras mère, tu seras une femme accomplie »… ça m’horripile de se réduire à cela. Mais bon c’est en parlant et s’exprimant que l’on arrive à faire bouger les lignes. Souvent par mon discours j’ai vu des sourcils se soulever, des langues se délayer comme si avec moi il n’y avait plus de tabou à avoir.
        Moi en tout cas, mon avis est fixé et j’attends avec impatience la ménopause pour enfin ne plus être « capable » de faire des enfants. C’est la liberté ultime ! Vous vous rendez compte, les femmes peuvent faire l’amour sans se soucier d’avoir des enfants ! Il faut leur dire qu’après 50 ans elles ne sont plus intéressantes si non elles vont se sentir supérieure 😉

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      2. Oui, le mot « endoctrinement » est très juste. Je ne veux pas me faire de la pub, mais j’ai écrit un article sur l’intériorisation par les femmes des normes sexistes (« Les copines du patriarcat »). 🙂
        C’est quelque chose qui m’a toujours profondément choquée, mais qui s’explique, finalement.

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  6. Article très intéressant, j’ai autant apprécié le style que le contenu.
    Pour l’avoir entendu dans mon entourage, je pense que la pire réaction, cela a été d’une personne qui n’en voulait pas à la base, mais qui s’est retrouvée mère de deux enfants un peu malgré elle je pense, essayer de convaincre une autre, qui sait ne pas en vouloir, en lui disant « Moi non plus je n’en voulais pas, mais c’est la plus belle chose qui soit arrivée dans ma vie ». Déjà, il faut arrêter avec cette expression, quelle pression cela met aux enfants… Ensuite, le respect de l’humain c’est de pouvoir accepter qu’il fasse d’autre choix que toi, dangereux pour personnes, et que ça ne regarde personne en fait.
    J’ai apprécié la remise en question des indicateurs de taux de natalité dans l’article, je n’avais jamais remis ce concept en question alors que l’on a à l’heure actuelle bien d’autre moyen d’évaluer la croissance d’un pays, si c’est nécessaire.
    D’un point de vue personnel, j’ai hâte que cette obligation d’enfanter soit déconstruite. Parce que trop de gens n’ont pas vraiment la fibre parentale et dans ces cas là je me dis que c’est quand même mieux s’ils questionnent leur choix.
    Merci, je vais aller découvrir le reste des articles !

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  7. Comment pouvez-vous dénoncer les injonctions de la société, le conditionnement dans lequel on est, si vous-même vous colportez une injonction?
    Non, le sexe n’est pas un besoin comme vous l’écrivez/le citez. Le sexe est une envie, un désir, autant que le fait de vouloir des enfants ou non. Personne n’a BESOIN de sexe car personne ne mourra s’il n’en fait pas. Cette injonction est très dangereuse car c’est une ligne de défense utilisable par les violeurs « bah quoi j’en ai besoin! ».
    La société actuelle nous fait penser que nous avons besoin de sexe, cela pousse un nombre incalculable de gens à s’envoyer en l’air sans en avoir envie. En clair, parce que c’est vu comme normal, car ils ont peur d’être rejeté, de perdre leur compagnon.e, ces gens là se laissent violer.

    Cette phrase de votre article me met hors de moi, me choc et m’empêche de lire le reste, je ne peux faire confiance après avoir lu de tels mots.

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    1. Ce n’est certainement pas moi qui irait dire que le sexe est un besoin au même titre que manger ou boire (le premier article publié sur ce blog traite justement de ce sujet !). Je suis parfaitement d’accord avec vous.
      Ce à quoi vous faites référence, c’est une citation du sociologue américain William Goode, que j’ai traduite moi-même. Ce ne sont PAS mes propos. Il faut bien sûr les replacer dans leur contexte (le monsieur est né en 1917…). C’est vrai, j’aurais pu mettre une petite astérisque pour rappeler que le sexe n’est en aucun cas un besoin primaire. Mais j’avoue que quand j’ai écrit l’article, je n’y ai pas pensé (mea culpa) !

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  8. Mille merci pour cet article !!!!

    Je suis actuellement en pleine création d’un podcast essentiellement sur le sujet du désir ou non de faire/vouloir des enfants qui s’appelle MôME?
    Je suis moi même dans le cas de non désir.

    La bande annonce est déjà dispo et le premier épisode sort lundi 🙂

    iTunes :
    https://podcasts.apple.com/…/podcast/m%C3%B4me/id1459755467…
    Spotify :
    https://open.spotify.com/show/1SHRlilztVWQESb2GPsKA4…
    Soundcloud :
    https://soundcloud.com/user-672938040/mome-bande-annonce

    Très belle journée à toi et tous.te.s !

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  9. Juste pour ajouter que, à 25 ans à peine, on (ma famille, pas les amis ni les collègues heureusement) ) a commencé à m’embêter avec ça.
    Le problème, c’est que mes proches ne savaient pas que j’étais déjà en train d’essayer de faire un enfant.
    Maintenant, cela fait 18 mois que nous échouons -et nous savons pourquoi-, et les remarques sur « Quand est-ce que tu fais un bébé ? » sont franchement douloureuses, ce pourquoi j’ai fini par tout dire à ma famille.

    Dans notre cas, c’est vrai que si je m’y prenais dans 10 ans, ce serait très compliqué car j’ai une baisse ovarienne précoce ; mais il se trouve que c’est en fait mon compagnon qui est infertile.

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  10. Bonjour, dans le cadre de mon mémoire de master en sciences sociales, je m’intéresse à l’horloge biologique et notamment sa déformation et réutilisation dans cette injonction à la maternité, mais plus largement à la parentalité. Je trouve votre article très complet, mais n’arrive pas à retrouver les sources sur lesquelles elles sont basées comme notamment l’étude « conduite sur une décennie et publiée en 2011 dans la revue académique Emotion ». Je pense qu’il s’agirait là d’une source suffisamment solide pour alimenter et développer ma recherche. Aussi, je vous remercie si jamais il était possible de m’indiquer où trouver cette étude, étant donnée que je ne la retrouve pas en passant par un moteur de recherche, ni en cherchant directement le titre de la revue.
    Merci beaucoup et bonne continuation !
    Margaux.

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  11. Très bon article. Perso j’ai 47 ans et je n’ai jamais eu le désir d’enfant et -peut-être suis-je une exception- je n’ai jamais non plus eu aucune remarque autour de moi. C’est un non-sujet pour moi et sans doute cela se sent-il je ne sais pas.

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